mercredi 10 août 2016

11e chronique de l'été: un roman islandais que j'ai acheté dans une braderie sans connaître l'auteur mais connaissant la vitalité de la littérature policière scandinave. Je suis toujours à l'affût de nouveautés. Je n'ai pas été déçue...

L'auteur: 
Kristin Marja Baldursdottir est  née en Islande, à Hafnarjordur, le 21 janvier 1949. Elle a obtenu en 1991 un diplôme de philologie germanique et islandaise. Pour ceux qui l’ignorent, la philologie est l'étude d'une langue à partir de documents écrits).
De son propre aveu, Kristin Marja Baldursdottir a écrit " ce roman afin de tirer une sonnette d'alarme, la place des femmes en Islande étant en régression alors que c'est le premier pays à leur avoir donné le droit de vote, en 1915."
Elle a publié quatre romans, un recueil de nouvelles ainsi qu'une biographie dont je n'ai pas trouvé l'objet.

Le roman:
la particularité de ce roman est que chacun de ses chapitres commence par la description d'un dessin ou d'un tableau de l'héroïne, avec sa date et une très brève description, illustrant la partie de sa vie racontée dans le chapitre même.
La plupart des dialogues sont rapportés au discours indirect et mêlés, sans distinction aucune, aux parties narratives et aux pensées des personnages :" Karitas se sentit embrouillée et mal à l'aise, non pas parce qu'elle était assise autrement qu'elle aurait dû l'être, mais plutôt parce qu'elle ne se rappelait pas avoir une seule fois vu un joueur de violoncelle. Pas plus qu'une photo de celui-ci, pas même de l'instrument. Quelqu'un n'avait-il pas dit que c'était un gros violon? Devait-elle s'aventurer à dire quelque chose, bouger et révéler son ignorance? Elle qui ne savait même ce qu'était un joueur de violoncelle. Peut-être, dit-elle en souriant."( page 123).
Critique parue dans La Savoie: " Le lecteur parvient au terme de ce récit bouleversant avec une folle envie d'embarquer vers ces contrées éblouissantes"...

L'intrigue:
Steinunn, mère de six enfants, se retrouve veuve. Elle décide alors de quitter sa ferme et de partir dans le nord du pays, s'installer à Akureyri, afin de mettre ses enfants à l'école et, ainsi, de leur offrir l'opportunité d'échapper à la rude vie de paysan et/ou de pêcheur. Décision bien inhabituelle qui démontre le courage de cette femme exemplaire qui, jusqu'au bout, se battra pour donner à ses enfants les moyens de se construire une vie qui leur ressemble, de se sortir de leur condition de pauvreté. D'un fjord à l'autre, des quatre coins de cette grande île battue par les vents marins, à travers des paysages magnifiques, Kristin Marja Baldursdottir nous emmène sur les traces de Karitas, la plus jeune des trois soeurs.
Le contexte: l'Islande de 1915, dans une lutte de chaque instant contre le froid et la misère où pourtant, tout est possible, dans ce monde pétri de traditions mais aussi de modernisme; où les paysans, les pêcheurs croisent la route de gens entreprenants, désireux de s'appuyer sur l'héritage du passé afin de construire un pays neuf, moderne.

L'Islande:
le climat y est rude, sans concession aucune: " La banquise pénétra avec eux dans le fjord, leur terre promise. Les flancs des montagnes étaient tachetés de blanc et couronnés d'un voile gris. Un souffle glacial et mordant s'infiltrait dans le cou et sous les jupes. Les blocs de glace flottaient sans but dans la baie peu profonde de Pollurinn, ils tressaillaient et s'éparpillaient lorsque l'express côtier fonçait impitoyablement sur eux." (page 39).
Plus loin: " Le soleil de minuit miroitait sur les vitres mais la glace qui errait dans l'entrée du port se comportait comme si la saison ne la concernait pas, elle ne montrait aucun signe de départ quoique juillet soit bien avancé" (page 47).
Ainsi que le montre si bien l'auteur, les paysages sont beaux et rudes, à l'image de ces hommes et de ces femmes qui luttent avec grand courage contre l'inclémence des éléments.

Les thèmes: 
les trois thèmes principaux développés dans ce roman sont: une société dont la rudesse évoquée plus haut a permis de développer des qualités telles que le courage, la persévérance, mais aussi l'entraide et le travail, car sinon, comment s'en sortir lorsque le premier adversaire est le froid, la nuit, le vent?
Ensuite, la peinture, bien sûr, puisque l'ambition de Karitas est de devenir un peintre très connu dans son propre pays.
Mais le thème principal, celui qui se cache derrière chaque brin d'herbe, chaque montagne, chaque fjord est celui des femmes, de leur condition, de leur rôle indispensable dans cette société encore très rurale; elles en sont le pivot, le moteur, le port d'attache, le phare dans la tempête...

Citation: 
" (...) et souvenez-vous toujours de vous soutenir les uns les autres dans la bataille de la vie, c'est notre devoir de nous entraider, c'est ainsi qu'ont prospéré les familles en Islande et c'est pourquoi la nature n'a pas pu venir à bout de nous. Nous luttons, nous, les Islandais, nous luttons" (page 85)
Quel plus beau message pourrait clore ce magnifique roman?

Mon avis:
vous l'aurez bien sûr compris en lisant ces lignes, j'ai carrément adoré ce récit; j'en ai aimé chaque ligne, chaque passage; j'ai aimé sa poésie, la magie de ce pays méconnu, de ses paysages, de ses légendes, de sa lumière. La force, la sérénité qui s'en dégagent nous apprennent que chacun d'entre nous possède son destin entre ses mains, qu'il faut s'accrocher très fort à ses rêves, à ses envies, à ses ambitions, et tout faire, tout donner pour les réaliser, sans jamais se laisser abattre par l'adversité, quelle qu'elle soit.

Ma note: 19/20











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